Cet article ne va pas concerner directement l’actualité de notre voyage, il est assez personnel, mais il y est néanmoins étroitement lié dans la mesure où nous arrivons dans une région qui me tient particulièrement à coeur.
Souvenirs, retour en arrière (avec beaucoup de nostalgie, mais des sourires quand je me souviens…
C’était il y a plus de 30 ans… déjà… je ne sais précisément quel âge j’avais. 4 ans? 5 ans? bref… Le mercredi, je n’avais pas école, mais mes parents travaillaient. Du coup, c’était ma chère grand-mère qui s’occupait de moi. Avant de se rendre à son travail, ma mère me déposait donc en voiture chez mes grand-parents, qui vivaient juste à côté, puis elle partait à son travail.
J’avais pris avec moi les jouets qui allaient m’occuper pendant la journée. Les journées d’hiver, il faisait encore nuit, mes grand-parents se préparaient à une nouvelle journée et étaient dans la cuisine de leur vieille et modeste maison quand j’arrivais.
Un feu chaleureux et bienvenu brûlait dans l’âtre, mon grand-père avait posé le vieux gril au-dessus des braises ardentes et faisait dorer des morceaux de saucisse ou de « ventrêche » (de la poitrine fumée) qu’il mangeait avec l’incontournable pain de campagne qu’il coupait dans de grandes miches. Son petit-déjeuner avalé, il pouvait commencer sa journée de labeur et s’occuper du royaume sur lequel il régnait. Un royaume dont les richesses se résumaient à ses quelques vaches, ses quelques terres, les arbres autour de la maison et son établi dans le chais derrière la maison. Observer, écouter ses sujets le remplissait de bonheur et faisait de lui le plus heureux des hommes malgré la modestie dans laquelle il vivait.
Ma grand-mère, elle, s’occupait des poules et des autres animaux, préparait le repas qui allait longuement mijoter sur le feu, faisait le ménage, faisait des câlins au chien et aux chats qui dormaient paisiblement près de la cheminée. Bref, une journée ordinaire dans une ferme de la campagne gersoise.
Ces journées étaient associées avec un rendez-vous immuable : une émission de TV depuis longtemps disparue : Récré A2. Et dans cette émission, il y avait la série animée qui irait me marquer durablement et que je ne manquais sous aucun prétexte : Les Mystérieuses Cités d’Or. Le seul générique me donnait et me donne encore des frissons.
Le 16ème siècle
Des 4 coins de l’Europe,
De gigantesques voiliers partent à la conquête
Du Nouveau Monde.
A bord de ces navires, des hommes,
Avides de rêve, d’aventure et d’espace,
A la recherche de fortune.
Qui n’a jamais rêvé de ces mondes souterrains,
De ces mers lointaines peuplées de légendes,
Ou d’une richesse soudaine qui se conquérait
Au détour d’un chemin de la Cordillère des Andes.
Qui n’a jamais rêvé voir le soleil souverain
Guider ses pas au coeur du pays Inca
Vers la richesse et l’histoire
Des Mystérieuses Cités d’Or
L’histoire commençait avec un petit garçon qui était amené d’Espagne vers le Nouveau Monde par un espagnol peu scrupuleux et cupide afin de découvrir l’emplacement des Cités d’Or, chimère que l’on connaît aussi sous le nom d’Eldorado. Dans la cale du navire, le petit garçon découvre une jeune fille Inca qui a est amenée de force par l’espagnol afin de l’aider dans sa quête. Arrivés dans ce qui est aujourd’hui le Pérou, ils vivront nombre d’aventures, rencontreront les Incas qui luttent avec la force du désespoir contre l’envahisseur espagnol. Ils y trouveront le bateau Solaris, puis le Grand Condor, gigantesque statue d’un condor capable de voler lorsque le Soleil est là pour lui donner l’énergie nécessaire.
Ils voyageront beaucoup, affronteront les cupides et sanguinaires conquistadors jusqu’au dénouement de l’histoire.
Ce dessin animé m’a complètement fasciné, fait voyager, littéralement fait rêver et profondément marqué. Je rêvais moi aussi d’être dans le Tahuantisuyo, l’Empire Inca, à vivre les mêmes aventures, voir les mêmes lieux, perchés tout là-haut dans la Cordillère. Et je me sentais complètement révolté par la barbarie des conquistadors, par les massacres qu’ils perpétraient, ainsi que le peuple, le savoir et la culture qu’ils anéantissaient.
Elle m’a fasciné, mais elle m’a aussi nourri et j’ai vraiment puisé une partie de ma vie dans cette histoire, cette époque et ce décor. Je pense que c’est aussi là que j’ai trouvé cette envie de voyager. Je pense aussi que le formidable livre Copain des Bois que ma mère m’avait offert alors que j’étais enfant, qui montrait comment se débrouiller dans la nature, comment fabriquer une cabane, identifier des nuages (…) m’a aussi beaucoup marqué. Livre que j’ai gardé bien précieusement. Quant aux Cités d’Or, bien évidemment, je rêvais d’aller voir avec mes yeux les endroits qui ont servi de décor à cette histoire. Bref, sans jamais être allé dans cet endroit, j’en étais déjà totalement amoureux. J’ai essayé de m’informer, de trouver des livres et d’en apprendre le plus possible sur les lieux, les croyances, les mythes et les légendes. Ce qui me rendait encore plus amoureux.
Bien plus tard, j’ai pu revoir cette série animée. C’est avec un peu de crainte que j’ai commencé la lecture en me disant que je me sentirais peut-être stupide d’avoir aimé cette histoire. Ce fut tout à fait le contraire : la revoir m’a permis de me conforter dans mon avis que cette série était absolument géniale et qu’on n’avait rien fait de mieux depuis. Et en revoyant la série, j’avais bien évidemment changé de regard et j’étais en mesure de reconnaître les endroits qui avaient servi à la trame de l’histoire : le Grand Condor qui se pose sur les Lignes de Nasca, la ville Inca du Vieux Pic dont l’entrée est scellée pour garder secret son emplacement : le Machu Picchu, les Urubus qui vivent sur des îles artificielles sur un immense lac : les Uros et leurs îles flottantes en totora sur le Lac Titicaca.
Et les mini-documentaires passionnants consacrés à l’Amérique du Sud, racontés par la voix enivrante de Jean Topart qui venaient conclure chaque épisode venaient encore nourrir la fascination que cette série avait créé en moi pour l’Amérique du Sud que j’identifiais et résumais en le pays Inca.
Ce fut donc en 2009 que j’ai pu concrétiser mon rêve et partir en pèlerinage dans les décors des Mystérieuses Cités d’Or. Survoler les lignes de Nasca, visiter les ruines Incas de la vallée Sacrée et surtout, marcher le mythique Camino del Inca pour enfin apercevoir le mythique Machu Picchu depuis la Puerta del Sol alors que le Soleil souverain se levait au-dessus des montagnes voisines : j’ai pu réaliser ce vieux rêve.
Aujourd’hui encore, je continue à être fasciné par le Pérou et la Bolivie, pour leur culture si particulière, pour ces ruines, ces lieux chargés d’Histoire, pour ces décors naturels chargés de magie. Et à l’heure où on ne parle que de mondialisation qui entraîne aussi la dilution des cultures pour une uniformisation des modes de vie, c’est avec de l’émotion que je regarde les gens continuer à porter leurs vêtements traditionnels (par pitié, ne me parlez pas de « costumes traditionnels »), de continuer à vénérer la Pachamama.
Je me rappelle de mes lointains cours de catéchisme où un épisode de la Bible décrit comment Dieu dit aux hommes (je ne me souviens pas des mots exacts, mais en substance, cela disait) : colonisez la Terre, répandez vous, soumettez la nature et multipliez vous. Cette injonction à laquelle sont venus se rajouter la cupidité et à l’avidité ont fait que notre monde occidental s’est mis à piller sans vergogne les ressources pourtant abondantes que notre planète avait à nous offrir. Et c’était encore mieux si ces ressources étaient disponibles dans d’autres pays et si on pouvait exploiter pour le moins possible les populations locales. Des peuples qu’on dit « primitifs » (?!) avaient un rapport à leur environnement qui était un mélange de respect, de fascination et de vénération. Une montage, un lac ou une forêt devenaient ainsi une divinité que l’on vénérait et un rapport sacré était ainsi créé avec l’environnement. Ce respect faisait que ces gens traitaient avec respect ce qui les entourait, loin du pillage qui est fait aujourd’hui. Le symbole de la Pachamama, la Terre-Mère nourricière en est le plus bel exemple.
Je trouve bien dommage et bien regrettable que notre société nous ait fait perdre ce rapport sacré qui pouvait exister avec ce qui nous entoure. C’est bien triste que nos colonisateurs soient arrivés avec leur gros souliers en considérant qu’il était de leur devoir de convertir des peuples à adopter notre mode de vie suicidaire alors que ces gens vivaient parfaitement bien sans nous et que leur mode de vie était nettement plus durable que le notre.
En tout cas, voilà, me voici de retour en pays Inca. Et cette fois, Amandine est là ! Et c’est avec beaucoup de bonheur que je vois le lac Titicaca, la Vallée Sacrée, et tant d’autres endroits qui continuent de me fasciner, ainsi que les cultures qui perdurent encore malgré tout (on continue ici à faire des offrandes aux dieux et aux montagnes, à vénérer la Pachamama) se rapprocher.
Revoir ces décors, ces gens, ces cultures, leur tissus traditionnels aux couleurs éclatantes (j’en ramènerais des cartons entiers si je le pouvais!) : je suis vraiment heureux d’être de retour au pays des Enfants du Soleil.
Très émouvant cette petite incursion dans le passé et dans tes rêves d’enfants mon cher Fabrice ! 🙂 c’est vraiment un régal de te lire !! cela me permet de voyager dans le temps ET dans l’espace !! j’ai beaucoup de chance car je rentre tout juste de 15 jours de vacances et je vois que le blog a été complété à bloc, ce qui m’assure de très bons moments de lecture à partager vos aventures dans les jours à venir !! 😉 merciiiii pour ces récits qui sont de réels cadeaux !! je pense fort à vous !! gros bisouuuus les amis et continuez à bien profiter !!
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Merci, c’est super gentil (comme d’hab venant de toi!).
Bon courage pour ton retour à Paris. Là où nous étions ces derniers jours, Internet ne fonctionnait quasiment jamais, on va essayer de publier ces prochains jours 🙂
Plein de bisous
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